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Le Blogueur devant le Seuil
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28 février 2008

Le Coeur Inachevé : annonce / teaser

Allez en guise de "Teaser" un nouvel extrait du Coeur Inachevé, trilogie Cyperpunk se déroulant dans un sombre futur lointain. Texte accepté par l'@telier de Presse et par Gilles Vidal, ancien créateur des myhtiques éditions de l'Incertain. Je vais donc me retrouver avec Frémion, Andrevon, Anaïs Cross et Jean Yves Calvez pour me lancer dans l'aventure numérique. Idéal pour ce texte et pour tester un peu cette nouvelle piste pour la diffusion de textes en support numérique. Dès que le bouquin sort (301 pages bien tassées), je mettrai un portfolio sur le blog et quelques infos sur la suite à venir...   

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The main thing I hate about bus travel is that you have

to sit next to the type of people who ride buses

Kyle Barker

"Why I hate SATURN"

Bei jing District était l'une des villes-puits les plus profondes de Global-Cité. Elle se déployait sur plus de 200 niveaux et continuait à forer une terre recelant de nombreuses richesses : uranium, métaux rares, hydrocarbures. Ses servomines et ses sondes thermiques s'approchaient graduellement du centre de la planète. C'était donc un District très riche et de nombreuses corporations y possédaient un pilier/immeuble. Wyddie Crook, gamine de 21 ans, y vivait depuis son enfance. Elle résidait, pour le moment, chez ses parents, au 56 ième niveau mais depuis quelques mois, elle désirait briser l'unité familliale et demander à la toute puissante Agence Globale de Logement de lui fournir un appart pour elle seule.

Wyddie quitta sa chambre et se rendit dans le bloc cuisine. Un servo lui prépara un bol de nourriture-base, ainsi qu'un verre de néo-lait. Wyddie n'était pas bien grande, 2,05 mètres, rondelette et afroasiatique, elle avait un visage rond piqué de tâches de rousseurs, des cheveux noirs noués à la façon antique appelée aussi dreadlocks, une large bouche rieuse et des membres solides. Ce matin là, elle portait un blouson vert étriqué, un pantalon en Slack quadrillé et une paire de bottes en plasteen. Elle vida son verre de néo-lait et se préparait à attaquer sa ration matinale de nourriture-base quand sa mère entra à son tour dans le bloc cuisine. C'était une jeune sexagénaire, originaire de Komogo, une grande Kara qui, du fait de son boulot, était obligé de s'envoyer des stéroïdes concentrés. Gabora Crook bossait en effet comme auxilliaire humaine dans une servomine de Yushù District. C'était une grande ouvrière qui de temps en temps, devait manier les briseurs soniques et les phasers courts, tout en étant capable de diriger la SuperNode qui contrôlait la servomine. Elle ébourrifa la chevelure de sa fille et commanda une rasade d'HormoChoum au servo.

¾ Salut, ma petite Wyddie, t'es bien matinale...

¾ Je te trouve aussi bien matinale, M'a, de l'HormoChoum au petit déjeuner, heûrk...

¾ J'ai besoin de ça pour démarrer ma journée. Ey ! Trois heures de boulot par jour, quand même. Sans compter le transport. J'en ai pour une bonne vingtaine de minutes en Phastram. De toi t’épuiser une femme !

¾ Je sais, M'a, tu me l'as déjà raconté.

¾ T'énerve pas ma petite Wyddie.

¾ Je m'énerve pas, M'a.

Gabora ne termina pas son verre d'alcool à 50°. Elle émit une grimace et le jeta dans l'évier. Puis elle vérifia l'état de sa combi de plasteen. Cette dernière, de couleur brique, était basée sur le même modèle que les impers de protections des flics du cadre Elite. Les galeries des servomines pouvaient receler des dangers imprévus : explosions de gazs volatiles, surchauffes des sondes thermiques, effondrements, sans compter les attaques des clans. Gabora possédait également un casque incassable et capable d'absorber la plupart des chocs.

¾ Désolée, Wyddie, j'aurais pas dû te parler comme ça...Excuse moi.

¾ Arrête de t'excuser tout le temps, M'a, ça en devient pénible.

La grande ouvrière se plaça derrière sa fille et l'enlaça.

¾ Je t'aime ma petite fille, je t'aime très très fort.

¾ Yep ! M'a je sais.

¾ Qu'est ce que tu as prévu pour la journée ?

¾ J'ai encore rien prévu. J'aime pas prévoir. J'irais peut-être à l'école.

Gabora lâcha sa fille et lui demanda, prenant un ton grave :

¾ Tu as des problèmes ? Tu veux peut-être que j'augmente le montant de mes virements sur ton compte.

¾ Coupe ça, M'a ! J'ai assez de crédits avec le Minimex.

¾ Attends que ton père se lève, il pourra te dire si l'hypervision passe de bons progs.

¾ Je serais partie bien avant qu'il se lève. P'a n'émerge jamais avant 14 heures.

Gabora renonça. Elle prit son casque son son bras et quitta l'appartement non sans avoir gratifié sa fille adorée d'un baiser aussi émouvant qu'étouffant. Wyddie attendit qu'elle disparût pour s'essuyer la joue et finir son bol de nourriture-base. La jeune fille jeta un oeil sur la node portable qui ceignait son poignet droit. Doofus, un de ses amis, lui avait offert ce cadeau le trimestre dernier, pendant la fête apocalyptique du nouvel an 470. Il était 9-06 Heures. Son père roupillait encore sur son hypno.

Normal. Une fois de plus, il était rentré au petit matin, blindé à l'HormoChoum, l'organisme saturé de molécules anti-virales. Il s'était laissé entraîné par l'un de ses amis et Wyddie aurait pu retracer leur parcours tant il était invariablemant le même. Bouffe au niveau 24, dans l'un de ses piliers-restau qui faisait la gloire du District, sans doute s'étaient-ils offert les saloperies téléportées du Dragon Céleste ou du Kami en folie. Ensuite, petit détour dans un came-center histoire de remplir leurs paniers de noctambules. Ils avaient dû descendre dans les bas niveaux et vaciller de Barnéons en servobordels.

La jeune fille alluma l'hypercom de la cuisine et passa en revue les chaînes les plus intéressantes.

Turner/Kaolin débitait des infos, Golden Age diffusait une série Zéro antique, Gun Crazy d'H. Lewis, un film en deux dimensions qu'elle avait vu l'année dernière, alors qu'elle fréquentait un Apprenti-réalisateur originaire de Xico District. Il s'appelait Stach Bennings et elle l'avait laissé tomber après deux mois de dérive dans les bas-niveaux. Cet enculé de biomasse de Stach avait fini par rejoindre une phalange de Gueules-Blanches. Wyddie n'avait pas supporté de voir son lover se gratter la peau au mirco-laser pour se conformer aux codes des dérivants génétiques.

Elle changea de canal, ce foutu film lui flanquait le cloporte, pour atterrir sur UltraSound, une chaîne de musiques violentes (du Body/Rush ou du Nodo-Grind) et de collages en hypervidéo, regardée majoritairement par des Xcrackés et autres légumes bouffés par l'Orviétan et le Spatial K. Avec un sourire malicieux, elle commanda à la Node de booster le volume sonore. Les hurlements et les pulsations subsoniques emplirent l'appartement de la famille Crook.

Quelques secondes après, le père de Wyddie ouvrit la porte et pointa sa figure encore marquée par les excès de la nuit dernière. Crook Yeou était un petit sexagénaire replet d'origine Han. Cheveux noirs et drus, yeux bridés et large bouche. Il portait un pyjama écarlate et une pompe à dessouler était accrochée à son bras droit. L'ustensile était un simple cylindre, contrôlé par une une microNode qui surpervisait le filtrage sanguin et l'élimination des toxines. Les pompes à dessouler Veiss-Lechamps étaient les meilleures amies des grands fêtards de Global-Cité.

¾ Wyddie mon coeur, ça ne te dérangerais pas de baisser un peu ton émission ?

¾ Relaxe P'a, j'allais partir.

Yeou enleva l'aiguille plantée dans son bras et dégraffa la pompe avant de la poser contre la table. Il regarda sa fille en écarquillant les yeux et lui demanda :

¾ Pourquoi est-ce que tu as tellement boosté le son, alors ?

¾ Qu'est ce que tu veux ? J'vous dérange, peut-être, toi et M'a.

Sachant parfaitement ce que Wyddie avant en tête, c'est à dire son indépendance, Yeou se ravisa. Il s'excusa en joignant les mains et dit humblement :

¾ Non, non, tu avais sans doute envie d'écouter ton groupe préféré, c'est légitime.

Puis faisant semblant de s'intéresser aux images aléatoires et informes qui s'agitaient dans l'hypercube, il dit :

¾ Ha oui, ça doit être Prickpitt ou RadRags...

¾ Yep ! Moi j'en sais rien, je fréquente plus beaucoup les Barnéons tu sais.

Yeou se sentait mal à l'aise. Sa fille était de plus en plus agressive. Il avait beau essayer de nouer un contact, elle ne pensait qu'à casser tout ce qu'il lui disait. Yeou savait que Wyddie allait bientôt partir, malgré sa jeunesse. Enfin, 21 ans, c'était un peu tôt pour quitter la cellule familiale. le père Crook détourna les yeux et commanda un petit déjeuner au servo.

Wyddie baissa le volume puis coupa carrément l'hypervision. Elle fonça dans sa chambre. Un espace minuscule renfermant : son propre poste hypercom avec sa node, un grand lit-H, quelques tablettes encombrées de cubes programmes, un paquet de Canna ouvert, des progs éducatifs, des servoseringues estampillées du Globe Rouge et une servopeluche de nounours un peu rouillée. Elle ramassa un sac en plasteen qu'elle se colla dans le dos et avant de quitter l'appart, retourna dans la cuisine.

Son père, en pleine descente, buvait avec peine son verre de néo-lait. Sa peau semblait flasque sous le pyjama écarlate, ses yeux tiraient sur le vitreux et ses doigts étaient agités de tremblement.

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